Pourquoi un vin de glace ?

Le vin de glace ne mérite pas son nom en raison de sa température de dégustation glaciale-- entre neuf et douze degrés Celsius sont recommandés selon les goûts. Plus il est dégusté chaud, plus les arômes flattent le nez et le palais. Mais alors, pourquoi un vin "de glace" ? Le nom trouve son origine dans les températures glaciales auxquelles les raisins d'un véritable vin de glace sont vendangés. Pour leur chef-d'œuvre, les viticulteurs s'accommodent d'une matinée inconfortable, car ils ne dépassent pas moins 7 degrés Celsius (l'idéal étant moins 10 à moins 12 degrés Celsius), ils passent leurs vignes au peigne fin aux premières heures sombres de la matinée et ramassent les précieux raisins triés à la main.

Mais les mains et les pieds froids sont un prix volontiers payé pour le "trésor" collecté. Les raisins gelés sont pressés le matin même. Ce n'est que dans cet état que l'eau contenue dans les raisins reste congelée. Le résultat pressé est un moût très concentré, car le jus le plus sucré du raisin a un point de congélation plus bas que l'eau.

Le vin "de glace", un produit traditionnel allemand

Même si l'idée de vendanger le matin par des températures ressenties comme arctiques nous donne des frissons, nous autres Allemands ne pouvons pas, pour une fois, nous plaindre de nos conditions climatiques liées à la géographie. Dans peu de pays, les températures hivernales sont inférieures aux indispensables moins 7 degrés Celsius.

Même si l'écrivain romain Pline a parlé pour la première fois de vins issus de raisins gelés en 44 après Jésus-Christ, l'Allemagne peut se targuer d'une tradition du vin de glace non moins fière, vieille de bientôt 200 ans : 1829 n'a offert qu'une triste image de l'année viticole. Lorsque les viticulteurs frustrés de Dromersheim se sont tout de même mis en route en hiver pour récolter les raisins gelés, au moins pour nourrir les animaux, ils ont découvert pour la première fois leur douceur exceptionnelle. La suite de l'histoire est vite racontée : aujourd'hui, l'Allemagne peut se targuer d'être l'une des principales nations productrices de vin de glace, dépassée seulement par le Canada. A tout seigneur tout honneur : en 1982, dans le cadre d'un amendement de la loi allemande sur le vin, le vin de glace a également obtenu un niveau de prédicat indépendant. Un poids minimum de moût a été fixé, qui doit correspondre au moins à celui d'une Beerenauslese et qui varie selon la région viticole.

La récolte actuelle était sur le fil du rasoir

En 2015, beaucoup ont (une fois de plus) regretté la beauté d'un Noël blanc. Les viticulteurs allemands, eux, s'inquiétaient plutôt (à nouveau) pour leur vin de glace. En raison des températures inhabituellement élevées en décembre, les viticulteurs du Rheingau, par exemple, craignent déjà le troisième hiver consécutif sans vendange de vin de glace. Une petite comparaison historique permet de comprendre pourquoi cela est si exceptionnel : les échecs de 2013 et 2014 dans le Rheingau n'étaient que les numéros 2 et 3 depuis 80 ans. Jamais auparavant il n'y avait eu de défaillance deux années de suite. Et maintenant, la troisième était même imminente.

La récolte de vin de glace pour le millésime 2015 menaçait à plusieurs reprises de faire défaut. Après un début d'hiver extrêmement doux, quelques viticulteurs patients ont tout de même réussi à récolter les raisins tant convoités. Le gel soudain de janvier a permis aux viticulteurs de vendanger contre toute attente à une heure record, entre le 18 et le 19 janvier 2016.

Un vin délicat

Que ce soit en apéritif ou en accompagnement d'un dessert, le vin de glace fait toujours bonne figure. Il est particulièrement recommandé de l'associer à des desserts fruités ou à des glaces. Un peu plus audacieux, mais tout aussi impressionnant, est le mariage avec des fromages à moisissure noble. Le salé et l'amer se mêlent au sucré et au fruité dans une composition exceptionnelle - un vrai plaisir pour le palais !